Est-il (encore) plus difficile de trouver une nounou que de trouver un keum ?

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Et voilà. Une de plus. Ma nounou m’a plantée. Trop épuisant. Les trois heures de travail quotidien auront, après deux mois de labeur, finalement eu la peau de cette vaillante jeune femme mutique de vingt-cinq ans, qui aura préféré démissionner un vendredi matin sans demander son reste, nous laissant les chinois et moi sur le carreau, une nouvelle fois. La tout le temps malade, la parano, l’accro au selfie nichonné pris sur MON canapé et posté sur SON Facebook, la vénère, la suspicieuse, la désintéressée, la débordée, la fouteuse de bordel, la boulimique, l’agressive, la dépressive, je les ai toutes eues. Pourtant, comme lorsqu’on est en pleine période de célibat, et qu’on se remet en selle après toute aventure foireuse et un mirco-sas de décompression passé, ivre, à se demander entre copines pourquoi mais POURQUOI ça n’avait pas marché, j’étais repartie à chaque nouvelle histoire l’espoir chevillé au corps et le cœur rempli de la certitude que cette personne manifestement exceptionnelle deviendrait, enfin, la nounou de ma laïfe.

Et pourtant…

Comme à chaque nouveau plan foireux, le beau tableau s’est peu à peu fissuré, laissant apparaître çà et là les vices de formes habilement planqués par ces jeunes femmes pressées de signer, enfin, la vente de leur petite personne comme Stéphane Plaza réussit à refourguer des taudis stickerisés et home-stagé à de malheureux acheteurs entourloupés par un rafistolage de fortune. CRraaaaac.

« Ah non mais nous la nôtre est TOP ! Elle est chez nous depuis que Gaspard est tout petit on ne s’en séparerait pour RIEN AU MONDE ! » Comme une vieille célibataire en fin de parcours ghostée pour la centième fois par un énième bâtard croisé au Baron, c’est dans les pires moments que les autres, les chanceuses, vous rappellent que, elles, elles ont rencontré la leur direct, fait un beau mariage, avec amour partagé et chaque jour grandissant et absolument jamais entendu parler de ces galères de folles qui disparaissant ou changent soudainement de personnalité du jour au lendemain. Et de vous regarder du coin de l’œil en se demandant comment vous vous y prenez pour TOUJOURS tomber sur des tarées (ce qui est faux. Mais les chanmé c’est comme les hommes, elles se barrent ou sont déjà plus ou moins maquées). Et de vous poser sempiternellement la même question « mmmh c’est laquelle, celle-là, déjà ? » lorsque vous leur narrez une énième anecdote de nounou follasse, faisant semblant de s’en souvenir comme du type avec lequel vous couchottez depuis 2 mois et dont elles peinent à se remémorer où et comment vous l’avez rencontré déjà. Il y en a tellement…

Alors écoutez-moi bien, veinardes du matching nounoutesque at first sight : sachez-le, nous sommes nombreux et nombreuses à avoir traversé ce long chemin de croix semé d’embûches plus ou moins administratives ou juridiques qui nous mènera nous aussi, nous n’en doutons pas, jusqu’à cette femme merveilleuse qui ne casse jamais rien, aime nos enfants comme les siens, et n’en a d’ailleurs pas sinon ils seraient malades et ça serait galère, est tout le temps de bonne humeur, jamais absente, perpétuellement en quête de notre bien-être et partante pour rester à notre côté jusqu’à ce que la mort nous sépare (la nôtre, sinon ce serait galère again), et ce même si d’aventure on ne gagnait plus un rond parce qu’elle nous aiiiiime tellement qu’il n’est pas question d’argent entre nous voyons. Et sachez également que si par malheur vous deviez un jour vous retrouver seule, abandonnée pour une raison quelconque par votre perle adorée, vous trouveriez malgré tout chez nous une épaule réconfortante pour venir y pleurer lorsque, vous aussi (oui oui), vous vous ferez ensuite plaquer de bon matin par votre cinquième cancresse de la garde d’enfant à domicile. Mais POURQUOIIIIIII MOUAAAAAA ???

tristesse

Las, vous l’aurez compris. Si j’ai finalement trouvé un mec, je n’ai plus de nounou. Mais je garde espoir, il le faut ! Moi aussi j’ai droit au bonheur, j’en suis sûre. Si chaque pot a son couvercle, chaque famille a forcément sa nounou idéale non ? NON ?

Bon allez, je pars remater Mary Poppins en boulottant de la Haagen-Dazs enroulée dans ma couette comme un nem dépressif en attendant que mon téléphone sonne. Supercaligragiliscitik….. gnagnagna.

13 novembre : continue de pleurer dignement tes enfants, Internet

bougies

Encore. L’année 2015 se termine comme elle a commencé : dans la terreur, les larmes, le sang et l’état d’hébétude dans lequel nous sommes tous plongés, aujourd’hui, alors que cette fois, ce sont des fêtards comme nous, des amis proches parfois, qui ont été descendus en plein Paris par des fous d’Allah. Et comme en janvier, une solidarité a très vite germé sur le sol de l’horreur.

Hier, immédiatement, sur Twitter, les riverains du 11e arrondissement ouvraient spontanément leurs portes à des inconnus perdus dans ce mauvais cauchemar de fin de soirée. Venez chez moi, je suis rue Amelot. Portes ouvertes rue de Lappe. Ca retweetait, c’était beau dans l’ignoble. Ce matin, les photos des disparus étaient viralisées sans relâche par tous, parce que ces injoignables auraient pu être des potes, des sœurs, des enfants à nous, et l’ont été parfois, forcément. Sur Facebook, on chialait, comme il y a dix mois, se parant de bleu blanc rouge pour afficher son soutien aux blessés, aux familles des victimes, et dire à ces amis réels ou même virtuels, parce qu’après tout on s’en foutait pas mal, qu’on était là, les uns pour les autres, à faire bloc contre l’indicible.

Et pourtant, déjà, on sentait le bel édifice pacifiste se fissurer par endroits. Lorsque certains proposèrent avant même l’assaut donné d’acquérir un tee-shirt « Pray for Paris » à 19 euros seulement. Lorsque des politiques fustigèrent celle du gouvernement pendant que des innocents étaient encore enfermés, faits comme des rats dans une salle de concert et que des fous d’Allah lobotomisés tiraient sans l’ombre d’un remords sur ce qu’on leur avait désigné comme l’ennemi suprême de leurs idéaux. Lorsque, plutôt que de pleurer décemment ces hommes et femmes grotesquement fauchés en plein moment de plaisir innocent, on tentait, déjà, de trouver des coupables, cherchant l’assentiment d’autrui pour calmer l’insoutenable incompréhension. Lorsque, bientôt, on cherchera laborieusement des signes, des codes secrets, des mises en garde, que l’on aurait dû lire, que l’on aurait dû punir pour éviter le drame comme si ça changeait vraiment quelque chose. Lorsque la haine remplacera l’union parce que l’indicible et l’inexplicable sont trop éprouvants, et qu’il faudra désigner un responsable pour calmer la douleur de se trouver aussi désarmé.

Ca craquelle, ça enfle, ça étouffe, je le sens bien. Comme avant.

Alors s’il te plaît, Internet, et surtout toi, Facebook, pleure joliment, décemment tes enfants martyrisés. Ne cherche pas de coupable, n’excite pas ce qu’il y a de plus sombre en toi, de plus abject, de plus nauséeux. Pleure parce que ces innocents sont morts, et que les détonations ont tenté, encore, de faire taire la liberté, le plaisir, l’insouciance mais ne mets pas en branle ta machine de haine si malheureusement efficace. Pour une fois, laisse les analyses aux experts, les récupérations aux odieux, les raccourcis aux idiots.

Et contente-toi de fleurir dignement les tombes de tes enfants assassinés.

Du bonheur de ne pas lire le JDD tous les dimanche

jdd

D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours passé mes dimanche avec le « jidédé » collé aux basques. Petite, face à mon père planqué derrière les grandes pages achetées à l’aube, au kiosque, avec les sacro-saints pains au choc dominicaux, je feuilletais déjà le « supplément femme » (« Tiens, ton journal ! ») -, n’y captant pas grand-chose mais débutant dès lors une tradition qui ne devait plus me quitter.

Trente ans plus tard, je prends toujours le même plaisir à acheter, chaque dimanche que Dieu fait, le Journal éponyme. Et pourtant, depuis que j’ai des enfants, et donc mille obligations sucrées, sportives ou tobogganesques, une gueule de bois pas possible parce que quand on dort de 3h à 6h, elle ne vous quitte pas malgré trois dolipranes et six litrons de thé vert, force est de constater que je n’ai plus le temps de le lire. Et vous non plus.

Enfin soyons francs. Vous aussi. Vous matez la couve. Que vous commentez : « Dingue ce crash d’avion ! Tu crois que c’est Daesh ? PUTAIN MAIS MERDE qui a renversé du Nutella sur le tapis ?! Ca sent pas la merde d’ailleurs ? PFFfff, bon ok je vais changer la couche. » Puis le feuilletez quelques heures plus tard, après avoir trainé votre vieille carcasse au marché, en commençant par la fin, quitte, parce que vous n’avez certainement pas le temps de décortiquer la grande enquête sur les intentions régionales de vos concitoyens. Alors vous lisez les critiques de restos qui ne sont JAMAIS de votre quartier, et dont vous oublierez le nom dans la seconde, après avoir pourtant promis de vous y rendre la semaine suivante (« Hein chéri ? Regarde çui-là il a eu 7/10 y paraît qu’y zont un super brunch ! Oh tu m’écoutes ? »). Entre deux parties de Uno, un tour au parc dans la brise glacée de l’automne et un atelier pâtisserie transformé en session aspirage de farine balancée aux quatre vents, vous chopez quelques phrases des critiques ciné, d’une interview d’actrice énervante et tentez, avant la nuit, de connaître le programme télé du soir (lequel n’est pas en dernière page, ce qui n’est pas bien pratique, avis aux éditeurs signé une très fidèle non-lectrice).

Au cours de vos déambulations diverses de ce jour du seigneur, vous aurez embarqué avec vous la feuille de chou, sans son supplément, resté bien propre et posé sur la table du petit-dej malgré le sourire de Bruel en couve vous incitant à lire son interview et le blabla de Claire Chazal qui vous y attendent à l’intérieur, femme. Parfois, lorsque vous n’aurez pas eu le temps de le choper de bon matin, vous ferez néanmoins tout Paris pour le trouver, coûte que coûte, malgré le jour qui s’éteint, le bain à donner, les légumes à éplucher, les devoirs à terminer, les cartables à préparer et la certitude d’avoir moins de temps encore pour non-lire votre Graal. Que vous emporterez finalement, lasse, percluse de courbatures et le corps fatigué par les activités familiales harassantes, dans votre lit. « J’te prends le Jidédé ! ». Alors que retentissent au loin les hourras des supporters du PSG et les chafouinages de Gros Pierre Menez à la mi-temps.

Et, alors que vous tentez avec bonheur de vous plonger dans les pages Livres passionnantes de votre bonbon hebdomadaire, vous sombrez dans un sommeil enfin réparateur, lovée contre votre cher amas d’articles délaissés mais non moins désirés, heureuse d’avoir pu, comme chaque fin de semaine, non-lire avec passion le Jidédé. Vivement dimanche prochain ! Lisez du papier.