Les températures grimpent et les silhouettes s’effeuillent peu à peu. En ce vrai jour de l’été (et des musiciens plus ou moins bien inspirés de se caler sous vos fenêtres), toute une partie de la population féminine, dont je ne fais pas partie, se réjouit de pouvoir troquer sa garde-robe hivernale pour d’affriolants décolletés, de divines robes fluides ou charmants petits shorts, baladant leur élégante silhouette caramel en milieu urbain.
Peut-on néanmoins avoir une pensée pour la seconde catégorie, dont je fais donc partie, qui entame là des semaines de désespoirs matinaux devant son dressing, rêvant devant les looks sublimes des pubs de magazines, s’imaginant elles aussi déambulant en débardeur micro-jupette les cheveux au vent, la peau tannée par un soleil bienveillant, avant de se rendre à l’évidence : cette saison n’est pas pour elle. Car oui, il y a selon moi deux typologies de filles : celles de l’hiver et celles de l’été.
Les filles de l’été ont des cheveux lisses qui ondulent joliment au contact du sel et du vent, au lieu de former une abominable petite boule sèche et frisottée au moindre coup de chaud. Les filles de l’été, ont des seins rebondis entre lesquels même la sueur est appétissante, et pas des plaques bleuo-rosacées qui se placent un peu partout sur leur poitrail-vampire épouvanté par tant de lumière (« houlalaaa qu’est-ce qui se paaaasse éteignez la lumière ! »). Non, les filles de l’été ont une peau à la carnation uniforme et mate, qui planque les imperfections rendues en revanche ultra visibles par la transparence incongrue de l’épiderme des novembrettes. Elles peuvent passer en 24 heures du jean-sous-pull synthétique au short-body sans même une marque d’élastique de chaussette aux chevilles, semblent épilées et manucurées de partout pour l’éternité, quand leurs homologues lutteront vaillamment deux mois durant pour tolérer leur triste enveloppe perdue dans des tissus fleuris aussi en phase avec leur blancheur qu’un riz cantonais et une escalope milanaise. Oui, nous filles de l’hiver avons souvent l’air d’un saucisson lyonnais recouvert d’un chiffon trop vif.
Les filles de l’été, elles, ont de beaux pieds rondelets sublimés par de jolis cuirs et des bracelets de cheville qui, sur celles de l’hiver, pousseraient à leur demander si elles n’ont pas zappé d’enlever leur clé de vestiaire de piscine municipale. Les filles de l’été plongent dans l’eau comme des sirènes, éclaboussent en sortant l’assemblée avec leur chevelure trempée gouttant gracieusement sur leurs épaules (« Pacifiiique, force anis ! »), les chapeaux de paille leur donnent des airs mutins et leurs rare coups de soleil se muent en adorables tâches de rousseur éparpillées sur les ailes de leurs nez.
Nous, filles de l’hiver, on a toutes connu ces stars des colonies, ces bombasses du kids club qui, telles des papillons de lumièèèère, prennent une ampleur désarçonnante et imprévue sous les projecteurs estivaux. Faisons le dos ronds, sœurs de l’hiver, car reviendra bien le temps où nos brushings bien figés par les souffles glaciaux des jours brefs referont leur petit effet. Où notre pâleur protégée à la SPF 50+ retrouvera sa place sur ce petit pull marine qui la met en valeur, épousant à merveille notre silhouette transcendée par notre jean préféré, celui-là même qui nous a été refusé tout l’été. Pendant ce temps, les Grâces du club Mickey repenseront tristement à leur bronzage des heures passées, reniflant à leur tour devant un dressing qui se dérobe et semble subitement ne plus rien contenir de portable. Chacune son tour.
Bon, en attendant, je ne sais toujours pas quoi mettre aujourd’hui.