Le « télétravail »

« Suite à votre mail, veuillez trouver….

– Mamaaan ?

– Quoi ?

– Je comprends pas l’exercice 4.

– … ci-joint le docuuuument…. Whaou ! Super, chéri.

– Quoi, super ?

– Hein ?

– Pourquoi tu dis « super » ? Je comprends paaaas le truc de maths. Ca veut rien dire « combien Perrine achète de billes… ».

– Ah pfff. euh, attends. Bon, ok, je continuerai plus tard. Alors, combien Perrine. Tu vois c’est simple, Perrine a cinq billes…

– Maman ?

– Oui ?

– Je peux prendre ton ordi pour regarder la vidéo d’histoire ?

– Hein ? Mon ordi ? Bha euh… attends, j’étais en train de faire un mail de boulot.

– Ah… Je fais quoi, alors ?

– Je… Tu n’as pas d’autres exercices ?

– Nan, je les ai faits. Tu m’as dit que tu allais les corriger. Ils sont sur ton bureau depuis hier.

– Hein ? Ah. Oui, oui. Je fais ça tout à l’heure.

– Et Perriiine ? Elle en a combien, des billes, alors ?

– J’arrive, chéri, attends.

– Alors, je peux prendre ton ordi ?

– Oui, vas-y. Nous on va s’occuper de cette bitch de Perrine avec ses putains de billes.

– C’est quoiii une bitch ?

– Rien chéri.

10 heures. Le cas Perrine finalement réglé, l’enfant a replongé dans son fichier. Tiens, je vais prendre mon iPhone pour envoyer mon mail, ce sera déjà ça de pris. « Suite à votre mail, veuillez trouver… » Nan mais il est obligé de lire à voix haute ? « Chéri, tu es obligé de lire à voix haute ? Ah, tu apprends ta poésie. Pardon. Oui, oui, je comprends. ‘Le bourgeon’, génial, c’est très joli. Non, je ne connais pas Paul Géraldy. Très bien, apprends. » Elles sont où ces putains de boules Quiès ? « Suite à votre mail, veuillez trouver Paul Géraldy… » Non mais n’importe quoi…

– Maman, y’a plus de batterie dans l’ordi.

– Hein ? Bon bha ça tombe bien, rends-le moi ! Et lis un livre, je sais pas. C’est quoi, cette manie des écrans ? On est pas dans la Silicon Valley ! Oui, voilà, prends le Bled. Oui, c’est chiant mais c’est la vie. C’est chiant.

– Mamaaaan ?

– Quoiiiiii ?

– On peut faire les collages ensemble ? La maîtresse elle a dit de chercher dans la maison des objets rapportés de voyage, de les dessiner et de faire des collages.

– Elle commence à me courir sur le haricot, moi, la maîtresse. J’ai du boulot, moi, MERDE.

– Tu dis beaucoup de gros mots, mamaaaan, nan ?

– N’importe quoi.

– Bha sinon, on peut aller regarder la télé, si tu veux travailler, on te dérangera pas.

– NON ! Non non non, le matin, c’est l’école ! On a dit qu’on faisait comme ça.

– On mange quoi, ce midi ?

– MERDEUUU !

– Gros mot.

– Me dites pas qu’il faut ENCORE refaire des courses !

11h30. Dans la queue du Franprix, alors que mes enfants font semblant de bosser, qui avec MON ordinateur et ses milliers de mails dont les expéditeurs attendent désespérément une réponse, qui avec mon téléphone portable dans lequel je retrouverai des centaines de selfies de trous de narines, je me demande qui sont ces mystérieux géniteurs qui ont « trouvé leur équilibre dans le télétravail ». Je me demande si ces gens ont des enfants muets, cuisiniers, séquestrés ou s’ils ont simplement baissé les bras. S’ils ont arrêté depuis belle lurette de corriger les exercices de « 1000 – fucking – problèmes », de compter les billes de Perrine et de chercher à offrir à leur progéniture un semblant de vie normale en les emmenant ensuite, après le goûter, humer l’air du dehors, en faisant un Risk ou en cuisinant une énième pâtisserie parce que, contrairement à plein de gens dans la société qui semblent avoir renoué avec la réalité, mes enfants continuent de recevoir des listes de trucs à faire enfermés dans leur appartement. Je me demande comment ces gens parviennent à faire des Zooms, des Skype, des Teams, parfaitement coiffés et maquillés, à rédiger des trucs intelligents, à aller se faire épiler deux mois de mollets confinés ou même à lire plus de trois lignes d’un bouquin. Et puis je paye sans contact derrière mon rideau de plastoc la tonne de courses que je vais ranger, éplucher, bouillir, cuisiner dans des ustensiles de cuisine que je vais laver, entasser dans ce putain de lave-vaisselle que j’aurai jamais autant vu de ma vie.

En rentrant, les enfants ont laissé tomber mon ordi et mon iPhone (tous deux évidemment déchargés), pleins de messages de gens qui ne comprennent pas pourquoi je ne peux pas répondre tout de suite à leurs demandes et ce que je bien foutre au juste. Alors, je les colle devant Disney +. Je capitule. Ouais, je me dis que ça doit être ça, télétravailler. Foutre la télé, et travailler. En toute culpabilité.

T’choupi 2 : un nouvel opus faible aux relents de jeunisme

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Voilà plusieurs années que T’choupi fait son spectacle au Casino de Paris, parvenant à réunir sur son seul nom nombre de familles venues témoigner leur admiration au pingouin (oui…) devenu, avec son acolyte Doudou, le chouchou des tout petits. Pro dans l’interprétation comme dans les chorégraphies, léchées, le premier volet de ce T’choupi tour nous avait enthousiasmés. Au point que, quelques années plus tard, c’est avec excitation mais une évidente appréhension suscitée par une exigence forcément immense que nous sommes partis assister un samedi, à onze heures, au nouveau tour de force du brillant binôme.

Las, n’est pas George Lucas qui veut. Car comme beaucoup avant lui, le marsupial superstar a raté son « re ». « T’choupi fait danser l’alphabet », promettait l’Hexagonal Tour 2015, sans que l’on comprenne toutefois où l’auteur a voulu nous emmener. Perdu dans ce scénario plus mince que la carte de l’Entrecôte, la petite troupe enthousiaste peine à donner le change. Lalou et Pilou, pourtant omniprésents, ne trouvent pas leur place dans une intrigue qui laisse peu de place au suspens, et moins encore aux personnages secondaires, relégués au rang de faire-valoir d’un héros transparent, hagard et engoncé dans un personnage dont il ne parvient pas, à l’instar d’un Kev Adams toujours persuadé de pouvoir jouer les adolescents, à se défaire. Quant à son acolyte, dont la fonction comique avait fait le succès du précédent opus, il semble perpétuellement absent, ballotté de bras en bras, tête baissée, alors que ses répliques ont été réduites à peau de chagrin. Si une certaine presse a murmuré que les deux amis de quatre ans songeraient à se séparer, Doudou souhaitant poursuivre une carrière en solo (à laquelle on peine toutefois à croire), on ne peut qu’abonder dans le sens d’une rumeur à la véracité palpable.

Last but not least, les parents de la star auraient eux aussi pris leurs distances, en témoignent les apparitions faméliques de la mère du héros, laquelle ne vint pas même saluer le public alors que la maîtresse de T’choupi, une certaine Sybille apparemment âgée d’une vingtaine d’années tout au plus, dansait main dans la main avec son époux a priori pas insensible aux charmes de l’Education nationale. Allégorie discrète de la crise de la quarantaine ? Sous-entendus nauséabonds sur les actrices post-quadragénaires pas même dignes d’écoper d’un rôle digne de ce nom ? Toujours est-il que cette ambiance familiale des plus étranges crée un malaise dont on peine à se défaire malgré une bande-son originale mais un manque évident de « tube » comme l’avait été l’inoubliable « boogie-woogie de T’choupi ».

Si T’choupi voulait faire danser l’alphabet, c’est finalement une troupe chagrine qu’il sera parvenu à se faire se trémousser vaillamment devant un public parfois malodorant, souvent sanglotant, mais toujours enthousiaste à l’idée de passer une heure et demie en compagnie de son idole, fût-elle embourbée dans un manque évident d’inspiration et d’indiscutables problèmes familiaux. Il en est ainsi des grands artistes, que la muse vient plus volontiers titiller lorsque le succès ne s’est pas encore installé. L’alcidé superstar se sera sans doute laissé engloutir sous un abus de confiance suscité par cet incroyable élan mondial qui l’érigea peut-être trop rapidement en idole absolue. Aujourd’hui, le gamin en salopette patine alors que son concurrent le guilleret et brillant TroTro mène dans le pays une tournée triomphale achevée en apothéose aux Folies Bergères.

Gageons pourtant que cet alphabet-là ne sera qu’un accident de parcours vite oublié dans la carrière d’un immense duo qui saura, et c’est certain, redevenir, enfin « rigolo comme tout » plutôt que trotro pas (rigolo).

Le Dieu des nounous

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Y a-t-il un Dieu des nounous ? Devons-nous à un moment payer le fait d’avoir eu une perle ou, au contraire, bénéficera-t-on d’un traitement de faveur de la part de l’obscure Olympe des gardeuses d’oies dès lors qu’on aura eu à subir l’atroce épreuve de la marâtre, de la folle, de la toujours malade, de la disparue du jour au lendemain, de la smartphoneuse frénétique ou de l’accro aux Anges de la téléréalité (vécu) ?

Lorsqu’elle attend son premier enfant, l’idée même du mode de garde hante la future maman d’autant plus que son charmant entourage ne manque jamais une occasion de l’interroger : « tu as trouvé une nounou ? », « une crèche ? », « fais gaffe, hein, tu sais que celle de la sœur du beau-frère d’un type avec qui je bosse enfermait le bébé toute la journée pendant qu’elle buvait du rhum dans le salon avec son mec ? Ouais, même qu’ils l’ont découvert en mettant une caméra ».

Merde… « Dois-je cesser de bosser et me consacrer pour toujours à l’éducation exclusive de ma progéniture ? Ou dois-je réellement risquer de confier la nouvelle prunelle de mes yeux à une inconnue dont mes fantasmes n’en finissent plus de lui trouver mille et une perversions ? », s’interroge alors sérieusement la future accouchée.

« Tu devrais aller l’espionner au parc ! Tu sais que la plupart ne regardent même pas les enfants. Si, je te jure ! Elles parlent entre elles et s’en tamponnent complètement le coquillard de tes mômes. Ils peuvent bouffer des vers de terre ou partir dealer au milieu des voitures du moment qu’elles peuvent papoter entre copines », papotent les copines de la future mère de famille.

Merde… « Dois-je embaucher une muette asociale ? », s’interroge alors de nouveau la novice.

Puis vient le moment tant et tant repoussé du casting puisque, bien évidemment, de place en crèche elle n’aura point. « Va sur bébénounou, c’est super ! », l’encouragent les vieilles de la vieille de la quête de Madame Garett. Le post de l’annonce puis le téléphone qui ne s’arrête plus de sonner. Les voix empreintes de cet enthousiasme qui donne immédiatement confiance (« Haaan, désolée, je me réveille de ma sieste »), les mille et une questions pleines de passion pour cette activité future (« Nan, j’ai pas de questions… Ah si, je peux regarder la télé avec les enfants ? »), les termes qui témoignent d’un réel intérêt pour la fiche de poste (« Non… non [silence, autosondage de l’âme], m’occuper d’un bébé de trois mois ça me… dérange pas, non »).

Dérange pas, diantre…, pense la casteuse désoeuvrée.

Et les inconnues qui défilent sur son canapé, checkant la confortabilité potentielle des lieux, alors que la fatigue intense de la récente accouchée apparente sa capacité de concentration à celle d’un junkie en fin de parcours.

« Et vous avez déjà gardé des enfants donc ? »

Alors que certaines ne jettent pas un regard au bébé, que d’autres au contraire fondent sur lui en propriétaires inquiétantes, que certaines énumèrent avec exaltation les mille et une activités d’éveil ludique et alimentaire qu’elles auront avec ce petit être qu’elle-même connaît à peine, l’angoisse enfle.

Qu’elle tente d’éteindre en passant ces coups de fil dits rassurants aux « références » indiquées sur le CV des inconnues toutes puissantes, et dont ses destinataires pourraient tout aussi bien être les mères, les sœurs et/ou les BFF desdites toujours géniales nannies.

Alors elle finit par choisir, et laisse faire le Dieu des nounous.

Certaines ont rencontré la nannie de leur vie du premier coup, c’est rare. Beaucoup ont connu de douloureuses expériences au goût plus ou moins amer. D’autres, comme moi, ont souvent changé de partenaires avant de rencontrer LA bonne personne.

La quête de THE nounou s’apparente à celle d’un homme. On croise plein de connasses, de folles, de filles qui ont l’air géniales mais finissent par vous lâcher sans raison, comme ça, déstabilisant pour un temps votre confiance. On cherche dans son entourage (« T’aurais pas un mec une nounou à me présenter ? »), on tâtonne, on espère, et puis un jour on trouve enfin celui celle qu’on cherchait, et on se souvient en riant de la nazitude de celles qui l’ont précédée. Le Dieu des nounous distribue, fait tourner sa grande roue et répartit à son gré dans les foyers. Les greffes prennent, ou pas, alors que l’on ne peut sous-estimer la place immense que tient ce personnage au rôle-clé dans le scénario de nos vies quotidiennes.

Alors aujourd’hui que la mienne doit malheureusement nous quitter, une question m’interroge : connaît-on dans sa vie de mère plusieurs grandes rencontres nounoutales ?

La vraie vie des mères actives Episode 3 : rentrée et réforme des rythmes scolaires

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Ayééé, notre working mum est rentrée de vacances (exténuantes, évidemment, rapport à la marmaille) bronzée que du dos et du cul à force de se pencher toute la journée pour ramasser jouets et bouées échoués sur le sable, et la couperose naissante à force d’avoir noyé sa fatigue dans le biberonnage de rosé à la nuit tombée.

C’est néanmoins le cœur vaillant et sans aucune arrière-pensée (si si) qu’elle se dresse donc, en ce jour de rentrée, devant sa porte d’entrée, une main dans celle de son rejeton, l’autre cramponnée, déjà, à son smartphone, toute prête à affronter son grand retour en open-space comme son come-back tant attendu en maternelle. En retard, déjà, elle traine avec difficulté l’enfant devenu plus volumineux (les glaces, sans doute, âprement négociées en échange de promesses multiples et variées) sur l’asphalte encore chaud de cet été indien. Devant la lourde porte de l’école, ils sont tous là. Les copains de l’an passé (dont l’enfant, comme elle, a oublié le prénom… « Ah bonjouuuuuur ! Et comment va… [regard suppliant vers Titi, qui doit bien se souvenir de son BFF putain][regard vide de Titi semblant signifier « c’est qui ce mec ? »] Il a grandiiiihihihi [yeux maléfiques de la WM roulant dans leur orbite en mode « tu pourrais faire un effort de mémoire putain »]), les mamans entièrement recouvertes de bébés en écharpes, devisant déjà de l’année à venir, de leurs espoirs de maîtresse (« Ah tu avais Axelle ! Elle est TOP ! J’espère l’avoir pour Capucine ! ») et leurs conjoints sollicités pour l’occasion, se sentant aussi à l’aise là, pour la plupart, que leur grand-mère au concert des One Direction.

Les portes s’ouvrent.

Tous, ils se ruent vers THE LISTS.

Se poussent, s’écrasent, éborgnent sans aucune pitié les nourrissons saucissonnés de leurs super copines d’il y a quelques minutes encore.

La working mum, elle, a no friends ici et aucun scrupule donc elle s’en tape. Et ses décennies de combat en milieu hostile (poste, queues de télésiège, cantine rayon pizza, Cojean ou ligne 13) lui donnent une longueur d’avance. MS2 check. Fanny check. 1er étage check. Elle saisit Titi qu’elle repère miraculeusement dans la marée et se jette dans les escaliers.

–          Poourquoi c’est pas la même claaaasse ? Pourquoi on passe par làààà ? Pour….

–          FONCE !

Devant la MS2 sont placardées des centaines de photocopies que ladite Fanny aura consciencieusement imprimées et épinglées la veille, lors de sa « pré-rentrée ». Sur chacune, un thème : « va au goûter » OUI / NON, « va à la cantine » OUI / NON, « va à la halte garderie le mercredi » OUI / NON [note pour plus tard : apprendre à la Fanny le principe du tableau à double entrée. Economie de temps et de papier…], « participe aux activités gratuites des mardi et vendredi de 15h à 16h30 » OUI/NON.

Nous y voilà ! La réforme ! Sa race. La working mum, comme d’hab’, n’a rien écouté, et attendu sagement qu’on lui explique le pourquoi du comment de ce barnum sociétal. Résultat, elle ne capte rien. C’est quoi cette histoire de 15h ? Merde en plus on est mardi, pas moyen de repousser à plus tard dans l’espoir d’une mort subite dans la journée. Elle se tourne vers ses ex-victimes tout sourire :

–          Vous êtes au courant pour les activités des mardi et vendredi ?

–          Bha oui c’est la réforme…

–          Mmhh, oui oui bien sûr. Mais ça consiste en quoi ? (honte)

–          Bha c’est des activités faites par des animateurs. Mais vous êtes pas obligés d’y aller. Sinon l’école finit à 15h.

15 heures ? L’heure à laquelle, habituellement, elle termine tout juste sa salade avant de replonger dans les dossiers laissés en suspens. No way. OUI ! Au moment de lâcher le bic scotché à une ficellle… MEEEEEEeeeerde. Elle se rend compte que « OUI » = 0 et « NON » = X. Elle avait collé des croix partout pour dire OUI. Elle rature chaque feuille pendant que la foule excédée trépigne, prête à la plaquer au sol pour récupérer le fameux bic. Devant le nom de Titi c’est tout caca sur les 10 photocopies. Rehonte. Note pour plus tard : apprendre à Fanny les conventions symboliques internationales.

Dans la MS2, Titi est déjà en train de repasser un playmobil en compagnie d’un vieil acolyte dont il ne souvient certainement plus du nom, mais auquel il raconte avec force détail comment maman s’est retrouvée à poil après un tour mouvementé en banane tirée par un zodiac. Il est temps de prendre la poudre d’escampette.

Dans le hall, un nouvel attroupement attire le regard de la WM. Les fameux « animateurs » des mardi et vendredi. Ne pas repousser, ne pas repousser… Et puis, la WM est reconnaissante à l’Etat pour son initiative. Qu’est-ce qu’ils ont tous à gueuler ? Faire du poney ou apprendre une langue étrangère deux fois par semaine, « à l’anglaise », quel bel exemple de démocratie ! Allons donc choisir parmi la pléiade de propositions. La WM kiffe le Club Med en milieu scolaire. Karaté, mini-tennis, chinois, anglais, échecs… à quoi allait-elle donc inscrire son rejeton, promis à un si grand avenir grâce à cette révolution inespérée (et gratuite) ?

Et là…

La

Désillusion.

A la découverte du monde animal / Activités d’expression / Ateliers théâtre / Autour de l’écrit et du conte / J’apprends à bien manger en m’amusant / Jeux et pratiques artistiques et ludiques / Santé et développement durable (sic).

Ok. Donc, THE réforme, c’est faire des jeux de société deux jours par semaine. Ah oui, et aussi tafer le mercredi ! Ce jour béni où la WM pouvait mettre entre parenthèse son contre-la-montre quotidien (la clepsydre ! la clepsyyyydre viiiite !), paressant langoureusement sous sa couette en famille, finite, kapout, vieux souvenir ! Bha ouais c’est la réforme ! La santé et le développement durable, à 3 ans, ça vaut bien un petit aménagement de l’emploi du temps, non ? Euh si si…

SMS de la sœur de la WM : dans son école, ils lui rendent les gosses à 15h parce qu’ils ont pas eu le temps de s’occuper des activités. D’ailleurs, ils savent pas s’ils y arriveront cette année. Mais les petits tafent quand même le mercredi.

La sœur de la WM va ptêtre perdre son emploi, ça s’trouve. Parce qu’elle n’a personne, à 15h, pour s’occuper des enfants.

Mais la vraie question, c’est : QUI va leur parler de la santé et du développement durable ?? Hein ?

Hard.

Plus tard, dans la journée, la WM recevra un coup de fil de la directrice. Personne n’est venu chercher Titi à 16h30 (après son premier cours sur le désastre radioactif à Fukushima, sans doute). Ah bon il devait rester au goûter ? C’était pas clair,  soit disant. Oups… La faute aux croix.

– Ne vous inquiétez pas, c’est un peu la foire, cette rentrée, avec la réforme ! », dit alors la directrice.

Ouais, c’est ça, la foirfouille.

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La vraie vie des mères actives – Episode 1

La vraie vie des mères actives – Episode 2 : le métro

La virée chez Ikea ou la règle des 300 euros en 3 heures

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Ponctuellement, chaque année environ, on retrouve le courage, voire même l’entrain sincère, pour partir un samedi aprem, en famille, chez le « géant Suédois » (non, malheureusement pas chez Zlatan Ibrahimovic mais chez son compatriote le concepteur de Grüntag qui, soit dit en passant, n’habite pas un hôtel particulier dans l’ouest parisien mais un beau triplex en tôle ondulée proche McDo et toutes commodités).

« Cette fois, on va juste faire un petit tour au libre-service, hein ! », vous promettez-vous de concert. « On se fait pas avoir par le premier étage, on fonce direct aux trucs de cuisine et autres gadgets en cire parfumée. » Enfin, « on ne reste pas plus d’une heure », concluez-vous, prévoyant quasiment un éventuel passage chez le coiffeur en fin de journée.

Vous voilà donc en route pour la ZI, chantant à tue-tête dans la voiture « Tchoupiiii et Doudouuuuu ils sont rigoloooos comme tout ! ». Rapidement parvenus au parking de M. Expedit (oh, à peine 50 minutes), vous vous garez sans encombre avant de rejoindre l’antre du meuble en kit. A l’entrée, l’aire de jeux dans laquelle la firme promet de garder vos enfants pendant que vous dépensez sans compter affiche « complet ». Vous détournez rapidement l’attention de l’enfant, lui promettant d’autres activités bien plus fun sur le chemin tracé à l’étage, et évitez ainsi un drame lacrymal fort sonore de justesse. Ouf.

A l’étage, la fête commence. Armés du célèbre it-bag jaune à larges anses, du mini-crayon manifestement  breveté sur un panel d’inuits plutôt que sur les paumes de nordiques nourris au Gravelak et du mètre en papier (on sait jamais, épi c’est gratos), vous suivez les grosses flèches au sol, avec une discipline inédite (le passage clouté, à côté duquel vous passez invariablement, peut aller se rhabiller), craignant manifestement sans savoir pourquoi, qu’un représentant  des services de l’ordre golgoth ne vienne vous remettre dans le droit chemin avec violence. Pourtant, il existe bien des passages secrets mais nul n’ose s’y aventurer.

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C’est donc tout naturellement que vous oubliez vos belles promesses, visitant avec l’entrain d’un aventurier de Koh-Lanta au Franprix les salons reconstitués, chambres douillettes (« Réveillez-vous dans une maison de campagne suédoise« … « Ca te dirait pas qu’on refasse toute la déco de la chambre ? Hein ? Non rien. ») et autres studios adolescents multicolores, emplissant peu à peu l’immense cabas jaune d’objets aussi utiles qu’un panier en plastique ventousable de toute beauté (pour y entreposer les jouets de bain remplis de caca noir), de l’éternel et abominable dessous de plat rond en liège, et d’un réassort de planches à découper molles, les précédentes étant fendues en leur milieu.

Au rayon enfants, vous en reprenez pour 45 minutes supplémentaires, attendant mollement que Titi ait fini de tester le laidissime fauteuil oeuf qui tourne, le train en bois, le tableau à craie, avant de passer et repasser indéfiniment dans le petit tunnel dans lequel se pressent ces clients de moins d’un mètre, se bousculant, se mordant, se toisant avec haine et défi (« T’approches j’te pète le nez avec la casserole en balsa »). Ca craint, viens on se casse. « Naaaaaan Ze VEUX des peluuusses. » Fin de l’acte 1. Il s’est écoulé 1h15. Quant à votre panier jaune, il est rempli à ras bord. Passage au sous-sol.

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Oh, des couteaux, on en a toujours besoin !! L’homme prend racine, retrouvant certainement sa condition première de chargé du chopage de Mammouth à mains nus. Il lui FAUT des couteaux ENORMES. NOW. Vous, vous partez flâner au rayon verres. Avec l’enfant. Grosse erreur. Après près de 2h passées à déambuler chez le géant surchauffé à bloc (en vous séparant de vos blousons, il semble que le Zlatan du meuble cherche à vous étourdir, vous faisant oublier, dans ce lieu sans fenêtres, l’heure, l’ailleurs, vos amis, votre vie, votre compte en banque…), Titi passe en mode cocotte, s’effeuillant à grand renfort de cris étranges, jetant dans les délicates pyramides de verres à pied au prix attractifs pull, écharpe, bonnet et même l’applique étoile pour laquelle la fameuse sortie avait été décidée originellement. Vite, suivez les flèches.

Tapis persans et bariolés laissent bientôt place à ces fameux tableaux aux auteurs inconnus (leurs acheteurs espèrent-ils qu’un jour, sur un malentendu, ils prennent de la valeur, ou choisissent-ils en toute innocence leur déco picturale en fonction de la teinte globale et de la dimension de l’oeuvre ? Mystère).

En tous cas, cette fois-ci, c’est décidé. Quitte à être là, vous prendrez une de ces plantes vertes à bas prix qui manque tant à votre intérieur ! En fin de parcours, le rayon végétal a souvent raison de votre patience.

– « Tu préfères quoi ? demandez-vous avec le bâton de batterie interne qu’il vous reste. Yucca ? Palmier ? Ho, ou ce gros binz, là, avec le tronc tressé et les trois feuilles qui pendent ? »

Sllence.

– « Alors, laquelle tu préfères ? »

– « Mmh… comme tu veux. »

– « Bha non, toi comme tu veux, c’est quand même notre salon. »

– « Ah, tu veux la mettre dans le salon ? »

– (gardant votre calme) « Bha ouais, on a déjà parlé 1000 fois, non ? »

– « Mmh… »

– « Bha sinon où ?

Hein ?

Silence

« T’écris des textos ? T’écris à qui ? »

– « Hein ? »

– « Putain mais t’en as rien à foutre de la plante verte ? TITI putain qu’est-ce que tu FOUS laisse ces feuilles !!! »

– « Mais c’est pour toi maman ! Des fleurs, cadeaux !

Putain vous faites chier.

– « Nan mais j’aime pas les plantes vertes e fait, c’est plouc nan ? Epi regarde ce qu’il va lui arriver de toute façon à ta plante. »

Vous vous sentez seule dans cet Eden végétal.

Vous n’aurez jamais de plante verte.

Ni de bougies parfumées, ni de lampe de bureau d’ailleurs car, le géant saumoné ayant décidé de ne rien changer à son parcours fléché en 25 ans, c’est toujours aux mêmes rayons que vous calez, entassant les dessous de plat en liège sans être jamais parvenue à avoir un éclairage digne de ce nom.

Allée 20 rang 8, vous passez prendre votre Mölga brun foncé, que vous avez bien failli confondre avec une Mälm, ce qui n’a rien à voir, vous en conviendrez (hahaha). Un petit passage en caisse et hop, vous serez bientôt débarrassés de cette réjouissante activité en famille qui, pourtant, vous emballe de moins en moins. Titi fait du skate avec vos caddies (oui, vous en avez maintenant deux), éparpillant Åkerkullås, Promenåds, Bervelågs et Ekknes. Quant à votre queue, il semble que, pour changer, vous ayez choisi la pire (des études tendent à prouver que le sentiment d’avoir choisir la file la plus lente dans un supermarché ou au péage soit inhérent à la nature humaine. Mouais.)

Vous parviendrez pourtant à faire biper vos 40 articles (vous le savez, car ce total vous a interdit le passage en caisse rapide 15 objets maximum), dont vous seriez bien en peine de faire l’inventaire.

Quand enfin la caissière annonce le tarif total de votre petite sortie en ZI pour acheter une veilleuse d’enfant chez le roi du design à prix discount, vous n’en croyez pas vos oreilles. 257 euros ! Pour des serviettes en papier ?!!!

Votre mec sourit beaucoup moins. Vous aussi. Quant à Titi, il est bien trop occupé à boulotter son 15ème Dubbla Chokladflarn, les succulents sablés au chocolat vendus dans des boîtes à chaussures sans couvercle (bim dans le sac).

dubbla

Dehors, il fait nuit.

Sur la route, des couples pomponnés se pressent vers la capitale pour aller guincher pendant que vous, sales et mal attifés, tentez de rejoindre vos pénates avant le générique de The Voice. C’est clair, il y a des embouteillages.

Vous aimeriez pouvoir sourire à votre concubin histoire de le remercier d’avoir accédé à vos desiderata (« Steuplééé on va chez Ikea attends on va s’éclater on mange un hot-dog à 1 euro [hameçon], on chope la lampe, des serviettes en papier et des bougies et on rentre ! ») mais vous ne pouvez pas.

Entre lui et vous, un carton de 2,50 m tente de se faire une place. Quand vous tournez les yeux, tout ce que vous pouvez lire c’est « Billy« .

Plus tard, vous niquerez un peu plus encore votre capital jeunesse en enfonçant avec cruauté vos paumes dans la célèbre clé Allen fournie par le géant sournois, officiellement persuadé que vous parviendrez avec ce trombone à enfoncer de très longues et épaisses vis cruciformes dans des trous de la taille de celui d’une punaise. Combien de familles éclatées, de divorces urbains, de crimes domestiques sont à imputer à la firme ? Vous vous promettez d’enquêter prochainement rêvant même, grâce à vos investigations, d’accéder à une célébrité bien méritée en faisant reculer, pour la première fois depuis des décennies, les terribles chiffres des séparations hexagonales.

Finalement fière, vous vous dites que si, en cinq ans, la terrible nymphette jaune et bleue n’est pas parvenue à faire vaciller votre couple, c’est qu’il est solide, lui.

Ce qui ne semble pas être le cas du panier en plastique ventousable si pratique qui, pour la troisième fois… BIM !

Première neige vertige en lui comme un manège

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En pyjama Spiderman et bavette en plastoc fatalement fendue en son milieu, il finit sa Danette, écrasant avec un soin professionnel la crème jaune vif sur son mignon visage.

–          « Tu crois qu’il va neiger maman ? »

Vaguement, vous regardez par la fenêtre et vous rendez compte que bha oui tiens, il neige enfin.

–          « Il neige, titi ! », vous dites.

Faisant voler en éclats le fonds du yahourt, il se jette alors sur vous, essuyant au passage son mignon visage, la Danette et le liquide qui s’écoule de la bavette fendue sur votre pull qui sort du pressing. Pas grave, il neige, quoi.

Vous le prenez dans vos bras, il passe les siens autour de votre cou mais ne voit rien, à travers la vitre un peu cracra que vous n’avez pas lavée au liquide bleu depuis une plombe.

Vous ouvrez la fenêtre. Alors, le vent froid vient pincer vos joues rougeaudes ramollies par la chaleur de la cuisine. Les flocons tombent dru, virevoltent, et constellent le ciel noir de ce début de soirée d’hiver. Certains parviennent même à atteindre le garde-corps, s’y collant un instant, laissant apparaître le dessin délicat des cristaux si réguliers que même adulte, alors que vous en avez vus 1000 fois, vous peinez encore à croire en leur véracité tant ils ressemblent aux illustrations des livres d’enfants, ou au logo de l’ESF sur lesquels, de niveau en niveau, s’agrègent les étoiles.

Il se penche dans vos bras. Il veut les toucher, les flocons. Et pourtant, ils fondent si rapidement dans ses doigts qu’il pense qu’ils disparaissent. Et puis ça vous fait peur, qu’il se penche comme ça.

–          Viens, habille-toi ! On descend, on va voir tomber la neige. C’est cadeau !

–          CADEAU !

Pure folie que ce resapage en pyjama à 20h15 un lundi soir, alors que vous attendiez impatiemment d’en avoir fini de la corvée petit-suisse, débarbouillage, pressée de passer des coups de fil, de vous faire à dîner ou de poser enfin vos fesses sur votre canap’. Et pourtant, ce soir-là, et cette pure folie, suspend un instant ce sombre quotidien de début de semaine.

Excité comme pas possible, il saute dans ses baskets qu’il met invariablement à l’envers, enfile sa doudoune avant que vous ne veniez visser de force sur sa petite tête son bonnet de laine grise.

Dans le hall, il sautille, plus joyeux que si vous lui aviez promis le plus incroyable des voyages.

Vous ouvrez la lourde porte de l’immeuble et faites quelques pas alors que la neige tombe à gros flocons, si bien que, tous les deux, vous êtes obligés de baisser la tête, aveuglés par les cristaux glacés. Puis, ensemble toujours, vous levez les yeux vers le tourbillon blanc. Il sourit, et se met à tourner sur lui-même, les bras en croix, poussant alors de petits cris de joie, son bonnet bientôt recouvert de petites boules blanches.

A travers sa vitrine illuminée, le boulanger vous fait un signe. On se croirait dans un conte d’Andersen. Un instant, Titi ambitionne d’aller lui taper un schtroumpf ou une banane mais renonce, bien trop accaparé par cette nouvelle découverte.

Bientôt, il faut rentrer. Secrètement, vous espérez que la neige tiendra et qu’il pourra, le lendemain, la prendre à pleine main, se jeter dedans.

De retour dans la maison chaude, alors que, ensemble toujours, vous retirez en frissonnant vos doudounes, il vous regarde du haut de ses trois ans et vous assène :

–          T’es trop cool.

Puis :

–          T’es vraiment une super maman !

Votre cœur, il pourrait exploser. C’est con, hein ? Tout ça pour trois flocons.

Vous le mettez au lit, lui lisez même deux histoires, ce soir-là, et n’êtes finalement plus si pressée de poser vos fesses sur votre canapé rapé, passer des coups de fil ou vous faire à dîner.

Par la fenêtre de sa chambre, il zieute les flocons alors que se paupières se ferment doucement.

Jouuuur de neiiige dans un grand pull qui me protèèège… Preeemière neige, vertige en moi comme un manège.

Jeunes parents : la fenêtre de tir

BILLET EXCLUANT UNE LECTURE PARENTALE (les miens)

Avant de devenir parents, le sexe faisant partie intégrante de votre couple. Lorsque le cœur vous en disait, vous pouviez décider de vous jeter l’un sur l’autre dans la cuisine, au petit-déjeuner, sur le canapé en plein 13h de Pernaut, sous la douche avant de partir au taf ou dans l’ascenseur en revenant du Monop’. Que dis-je ? Vous n’alliez pas au Monop, hahaha (rire enjoué des sans-soucis) vous étiez bien trop bohème pour ça ! Vous mangiez également lorsque l’envie se faisait sentir, au gré du vent, quelques cacahuètes entre amis après des apéros sur le pouce à n’en plus finir ou un gros tartare dans un bistrot à 2h du mat, après une partie de jambes en l’air impromptue.

Jusqu’au jour où… la petite personne a investi votre quotidien. Subrepticement, en scred et par paliers, l’enfant chéri s’est fait un point d’honneur à détruire avec application votre vie sexuelle. Nourrisson, vous pouviez déposer vite fait le couffin sur le palier de votre chambre, voir jeter un vieux doudou sur les yeux impudiques de bébé lorsqu’une envie vous prenait. Maisla petite personne s’est organisée, méthodiquement. De mois en mois, elle s’est évertuée à dormir de moins en moins, prenant du poids, plannifiant son sommeil avec organisation afin de caler ses naps sur les vôtres, préparant son coup comme à Fox River. Longtemps, vous avez pu niquer de bonne heure (référence !), en matinée (sieste pré-dej), l’après-midi ou le soir après 20h30 (si vous n’aviez pas trop faim). Entre 1 et 2 ans, le guetteur s’est ensuite refusé à vous octroyer votre pause syndicale matinale, instaurant discrètement un harcèlement infantile qui causerait bientôt votre perte. Zeveuxpasfairedodo. Damned. Qu’alliez-vous devenir ? Pas grave, chéri, il nous reste l’après-midi.

Pourtant, Michaël Scolfield allait rapidement trouver de nouvelles portes de sortie, se taouant sur le corps le plan de l’appart au feutre Crayola , entourant en rouge la chambre parentale, son objectif. La fin officielle de la vie sexuelle du couple adviendrait le jour où il scierait avec fierté (pauvres cloches) les barreaux du lit de bébé (snif). Libéré de ses chaînes, l’être créé par feu le couple heureux et épanoui allait alors pouvoir choisir à sa guise le moment où il accourrait dans la lit de ses parents, avec l’ambition certainement inconsciente (ou pas) de l’empêcher de procréer à nouveau, faisant de lui ou elle le petit chéri à jamais.

C’en sera alors fini du petit coup post-taf, du calin Motus, de la sieste crapuleuse et même du lacher-prise post-métro/boulot. Le petit être rôderait alors toujours en silence, se déplaçant avec souplesse sur ses silencieux chaussons-chaussettes Barbapapa, prompt à apparaître à n’importe quel moment (« Vous faites QUOIIIII ? »), manquant parfois de causer la mort violente de ses parents, atterrés par cette visite surprise tant redoutée.

« Putain Chucky s’que tu fous là ? » Vous l’imaginerez alors toujours sauter d’un bond de son lit tel un Gremlins malfaisant, venant tambouriner à votre porte (« Cacaaaaaaa ! Mais vous faites POUAAAAAAA ?!! T’es OU MAMAN ??? »). Bha rien, on essayait de niquer mais c’est pas grave, allons faire caca c’est tellement plus fun (« Pourpoua t’es toute nue ? » « Laisse tomber, va »)…

Sans compter les faibles, ces binômes procréateurs qui accepteront, las, de dormir avec leur progéniture, enterrant à jamais une jeunesse sexuellement active, ressassant de temps en temps leurs coups d’un soir ramenés titubant de L’Enfer, de la Loco ou du Bus, qu’ils idéaliseront à jamais, oubliant l’odeur d’alcool et de sueur, et les collants troués de leur partenaire du moment.

Comment ces couples parviennent-ils alors (et pourquoi, mais c’est une tout autre question) à fabriquer leur second tyran domestique incontinent ? Si l’on fait le compte et puisque toute spontanéité aura alors disparu en même temps que leur libido se sera déployée ou carrément endormie, au choix, les fenêtres de tir se feront rares :

–          Matin : over, à moins de mettre un réveil en vibreur à 5h du mat’ (donc, en cas d’absolue nécessité)

–          Journée : dans tes rêves

–          Soirée : entre 21h et minuit (pour les moins narcoleptiques) -> prévoir de commander à manger car incompatible avec un quelconque épluchage de légumes. Tabler éventuellement sur un plat qui mijote type pot au feu. Eviter absolument le risotto ou les oeufs brouillés.

–          Week-end : idem, voire pire si des largesses horaires ont été octroyées à l’enfant.

Ce qui nous fait donc un total de 7x2h en soirée de fenêtres de tir hebdomadaires si l’on exclut bien évidemment toute sortie, fatigue, gym, maladie infantile ou invitation à dîner chez soi d’amis en soirée, à moins de se sauter dessus une fois le dîner rangé, le lave-vaisselle rempli autant que son ventre bombé… Ouais, on aime ou on n’aime pas.

Fine, que voulez-vous je n’y peux rien mais j’ai une seule question pour vous,  amis parents, POURQUOI EST-CE QUE PERSONNE NE PARLE JAMAIS DE CE FLÉAU ???!!!!!!

Et surtout, comment Charles et Caroline Ingalls sont-ils parvenus à avoir autant d’enfants ?

Jeunes parents devant manège (dés)enchanté ?

Ils tournent de manière régulière, ininterrompue, entêtante, les gosses au manège.

Et vous vous les caillez grave.

Le type las et déconnecté qui semble tenir la caisse depuis trente ans vous a vendu à prix d’or un carnet, parce que, à l’unité, c’était vraiment pas possible, quand même, Titi putain tu te rends compte, 2 euros pour un tour de manège, 14 francs, plus cher qu’un paquet de Chesterfield sérieux – oui maman est vieille. Bref au final vous en avez pris pour 6 tours à 10 euros. Bha ouais, vous allez pas non plus vous faire entuber non mais.

Ca fait vingt minutes que, les mains dans les poches, vous partagez avec vos contemporains d’infortune cette étrange activité de fin de journée au moment où, il y a seulement quelques années, vous vous peletonniez dans un lit contre un corps connu ou inconnu mais chaud, les volets clos, l’esprit libre (comme votre pack BNP). A côté de vous, il y a la présidente des parents d’élève qui connaît tout le monde, gueule sur sa multitude de gamins, se plaint des scooters, des clopes, de la maîtresse qu’est tout le temps malade ou de la kermesse qui tombe pile le même jour que le vide-grenier non mais vous vous rendez compte. Il y a aussi les papas tout seuls qui, s’ils ne textotent (sextotent ?) pas avec frénésie, jettent des coups d’oeils (oui on dit des coups d’oeils, pas la peine de vérifier) de prédateurs pour prouver que de ce côté-là, ils ont beau changer des couches pleines de caca et se trimballer un lapin en peluche dans leur casque de bad boy, ils existent encore. De couples, il y en a peu. Bha oui, on se répartit les tâches. Des trenchs et des perfectos, il y en a plein. Bha oui, on est tous sapés pareil, comme à l’époque du lycée. Ca nous rassure.

Les gosses, eux, se répartissent aussi les rôles. La timide cramponnée à son volant, écharpe écossaise, bouclettes désordonnées, sosie miniature de sa mère, se concentre à fond sur « la route ». Voitures, trains, décapotables … Les cools prennent place dans les moyens de transport classiques, avant de se bastonner pour savoir qui klaxonnera le premier. Les plus courageux font la fierté de leurs papas en tentant un avion, un vaisseau spatial, un hélicoptère, bref un truc qui vole. Les marginaux posent leurs petits séants  sur des tasses, des carrosses sans roues, des soucoupes rondes mais pas volantes… C’est n’importe quoi, franchement. T’inquiète, ça lui passera, s’excusent presque les mamans.

Et hop, tournez manège ! Le type de la cabine croit alors judicieux de lancer une bonne musique de supermarché assourdissante, ajoutant au concert ininterrompu des klaxons des véhicules dont les enfants ont trouvé avec un bonheur indescriptible le bouton, un peu plus de nuisance sonore pour les spectateurs de ce numéro cent fois observé. Et que je monte, et que je descends, et que je remon-ah non redescends bip bip biiiiiiip tuuuut tuuut MAMAAAAANNNN !!! Bha oui y’en a toujours un qui se met à pleurer, provoquant honte et affolement chez son accompagnateur démuni. IL PLEUUURE ! Mais je comprends pas d’habitude il n’a JAMAIS peur pourtant ! (je vous jure, votre honneur !) Le public s’emballe peu à peu « ASSIEDS-TOI !!! NON NON NON ! TU GARDES TES MAINS SUR LE VOLANT !!! », ça gueule, ça se crée chaque fois les mêmes petites frayeurs, ça se donne en spectacle sans retenue. C’est le Guignol des grands, ça marche à chaque fois. Tournicoti tournicotons.

Et le vôtre qui vit l’aprem de sa life. Un tour, deux tours, maman je veux la moto, encore la moto, et encore la moto. T’es sûr mon chéri que tu vas pas regretter d’avoir fait que la moto ? C’est le dernier, hein ? Oui DERNIER ! Et l’hélicoptère maman ! On avait dit le dernier ! Oui oui mais juste encore dernier ! (logique implacable).

Le froid, le bruit, les lumières criardes, les peintures pailletées de ce vieux manège pas très secure, le Grazia que vous n’avez même pas réussi à ouvrir du week-end, Stade 2 que vous n’avez pas maté depuis quatre ans, votre meilleure copine qui raccroche au bout de 2 minutes parce que sa troisième manque de s’électrocuter avec l’épilateur et vos cheveux qui font éternellement la gueule, what else ?

Il repart dans son hélico, dont il découvre le levier qui le fait s’envoler.

Et puis vous le regardez, souriant de toutes ses dents minuscules, heureux comme c’est pas permis, fier si fier de faire « coucou maman ! » quand il vous trouve, une fois sur trois, alors que vous n’avez pas bougé d’un poil. Et vous aussi, vous faites « coucou ! », carrément enthousiasmée par cette petite personne, la seule à pouvoir vous faire marrer en vous collant une crotte de nez sur une robe neuve.

La nuit tombe, on est dimanche soir, les cafés ferment, il fait froid et pourtant, faut bien l’avouer, vous kiffez vraiment pas mal ce moment devant le manège enchanté.

Disneyland Paris, where the queue come true…

Avez-vous déjà fait la queue avec un enfant de deux ans et demi pendant une heure ? Avez-vous ensuite répété cette joyeuse expérience plusieurs fois de suite, sous le cagnard et entourée de centaines d’autres familles au rythme de chansons joyeuses diffusées a très fort volume sonore ? Bienvenue a Disneyland Paris, le monde merveilleux de Disney reconstitué à une heure de Paris dans la jolie banlieue de Marne La Vallée, où vous pouvez vous rendre en RER (et vous aurez raison), ou encore en voiture, que vous pourrez devrez alors garer dans un parking situé à une quinzaine de minutes en tapis volant roulant de l’entrée du parc, pour la modique somme de 15 euros. Cling (bruit de tiroir-caisse) !

Arrivée aux abords de notre Neverland national, vous passerez, en compagnie de votre progéniture excitée, devant une cinquantaine de faux magasins aux allures d’épicerie de Mme Oleson.

« Nan mon chéri on ne va pas acheter tout de suite un seau de pop corn Picsou à 1700 euros. Maman a dit NON ! Si tu n’es pas sage, on s’en va OOOOH regaaaaarde c’est Tic et Tac ! »

Putain mais ils sont ou ces personnages Disney ? Vous balayez alors du regard l’horizon bondé et, outre d’inquiétantes smalas en surpoids encombrées de ballons hélium Mickey, point de Pluto ni de Stich a l’horizon. Damned.

« Location de poussettes et de fauteuils roulants »,

pouvez-vous lire plus loin. Pfft, s’ils croient qu’ils vont nous avoir avec leurs produits dérivés. « Hein mon Titi, t’es un grand maintenant, plus besoin de poussette ! »

Vous entrez alors dans le parc, enthousiaste à l’idée de renouer avec le monde féerique de votre enfance…

Vingt minutes plus tard, vous n’avez toujours croisé aucune figurine Disney, pas même un Rapetou. Quant à Titi, il a depuis longtemps renoncé à marcher, et passe des bras de son père aux épaules de sa mère, et ainsi de suite, lesquels se sont peu à peu sanglés des pulls et sacs de toute la famille tant le thermomètre a grimpé. A moins que ce ne soit l’haltérophilie infantile qui provoque ces subites suées. A part de multiples ranchs dans lesquels on s’empiffre de sandwichs nachos-cheddar-sauce barbecue-sucre glace accompagnés de sodas XXL, point d’animation à l’horizon. Vous êtes déjà là depuis une heure.

Soudain, le miracle se produit ! Un petit train !

« Le p’tit crain maman ze veux faire le p’tit crain ! »

« Mais bien sûr mon amour, quelle bonne idée ! »

Sur le chemin menant à la « gare », vous trouvez même par terre un plan du parc. La bonne humeur revient. Vous êtes une famille heureuse, unie, toute prête à entrer dans l’univers fantasmagorique de feu Michael Jackson.

Temps d’attente estimé : 45 min, 

pouvez-vous lire sur un petit écriteau, en joyeuse typo broceliandesque.

Concubin : « Mmmh n’importe quoi. C’est forcément moins ! »

Vous : « Bha oui, forcément ! »

Dans la queue, un obèse prend en photo l’intérieur de la bouche de sa compagne, une grosse femme aux cheveux roses. Ensuite, il lui montre le rendu afin qu’elle trouve l’endroit où poser son ongle pour retirer le bout de nuggets qui semblait la gêner. Titi saute, s’échauffe, veut monter DANS LE CRAIN. Ouf, il arrive… 20 personnes montent dedans. Le cordon de sécurité est refermé avec autorité par un employé déguisé en chef de gare (salopette Osh Kosh, bandana, casquette). Devant vous, 80 personnes patientent avec résignation. Beaucoup ressemblent à ces candidats à l’humiliation qu’on voit dans les programmes comme Confessions Intimes ou Vis ma vie.

Quarante-cinq minutes plus tard, vous voilà finalement dans un wagon, accompagnés de la famille Adams (tous en noir, ils regardent dans le vide l’air éteint. Pourtant, ils ne semblent pas employés par le parc). Avec stupéfaction, vous découvrez dans le wagon adjacent qu’un couple sans enfant a patienté lui aussi une heure pour prendre place dans le chemin de fer en papier crépon. Ils sont venus d’eux même, par plaisir, tous les deux. Vous pensez alors, avec la voix du mec qui fait les  reportages dans « Capital » : « Ces couples qui viennent le dimanche après-midi à Disneyland Paris faire la queue pour prendre le petit train : qui sont-ils, que cherchent-ils, quels sont leurs réseaux ? Enquête ! »

Deux stations plus tard, vous descendez tout ragaillardis par cette balade au grand air de 4 minutes.

« Maman ze veux aller dans les fusées qui tournent ! »

Aucune interdiction aux moins d’1,40 m pour cette attraction, que Titi peut donc faire. Elles sont assez rares pour que vous vous éxécutiez sans broncher.

Temps d’attente estimé : 60 minutes.

Concubin : « Mmmh n’importe quoi. C’est forcément moins ! »

Vous : « Bha oui, forcément ! »

Forcément, ce serait trop atroce… Et pourtant, c’est bien une heure plus tard, après vous être refilé un Titi en mode anguille sous ecstas (essayez d’attraper une anguille sous ecstas qui, elle-même, chercherait à échapper à votre étreinte), l’avoir menacé de tous les maux (« Si tu continues je t’emmène à l’école TOUT DE SUITE ! »/ « Tu ne mangeras plus JAMAIS de chocolat ! » / « Tu ne verras plus JAMAIS maman ! ») et avoir échangé maints regards compatissants avec quelques familles alentours, dont une femme charmante à la coupe de Tony Vairelle, que Concubin et Titi prendront place à bord d’une fusée (vos fesses étaient finalement trop grosses pour que vous puissiez monter avec eux, vous avez dû battre en retrait et faire coucou d’en bas). Quelques 37 secondes plus tard, vous les retrouvez à la sortie, poussés par le personnel excédé. Dehors !

Vous êtes là depuis 2h30. Vous tentez alors les tasses d’Alice au Pays des Merveilles. Ca a l’air un peu naze, du coup y’a pas grand monde.

Temps d’attente estimé : 15 minutes.

Dix minutes plus tard, alors que vous tournez à fond la caisse, le dernier verre de St-Estèphe que vous avez accepté la veille à 2 heures du matin vous revient en mémoire… Blurp.

« Bon allez, une dernière et on y va ! »

« Ze veux faire Dumbo ! »

Temps d’attente estimé : 60 minutes

Concubin : « Mmmh n’importe quoi(…)C’est f… »

Vous : « BON, on fait le calcul ?!! »

La queue se fait sous une bâche. Là, des familles entassées et excédées comprennent toutes ensemble ce que l’enfer doit représenter. Et pourtant, elles sont venues ici sans contrainte. Elles ont même payé pour ça. Les enfants, les uns après les autres, se mettent à pleurer, qui dans les bras de ses parents qui n’ont même plus la force de les engueuler, qui en se suspendant aux barrières qui donnent sur des étendues d’eau dont le danger ne fait plus peur à personne. La musique tourne en boucle, assourdissante. La queue fait des serpentins, si bien qu’il est impossible de calculer l’état de son avancement.

Concubin : « Tu fais la gueule ? »

Vous : « Nan. Je me tâte entre la pendaison au lasso Indiana Jones ou la noyade dans l’étang de Peter Pan. »

Concubin : « Oh, t’es pas marrante ! »

Titi : « Pipiiiiii ! Pipi ET CACA ! »

Concubin : « RETIENS-TOI !»

Vous : « Mais tu vois bien qu’il peut plus se retenir. Rien à foutre on va pisser à travers la barrière. Z’ont qu’à pas nous laisser poireauter 2 heures avec un enfant de 2 ans. Ouvre ta braguette, Titi ».

Titi : « Naaaaan ze veux pas faire pipi ICI ! »

Le tour en Dumbo aura duré 23 secondes.

Lorsque vous en descendez, et après avoir fait la queue aux toilettes (temps d’attente estimé : 1 minute. Un luxe), il est 19h15.

Dans 1h30, vous serez de retour chez vous. Vous aurez fait 4 manèges et 4 heures de queue.

Si vous n’aviez pas eu les billets gratos, il vous en aurait coûté 70 euros +  les extras = 4000 euros.

Votre mec vous hait. Votre enfant dort, et il ne sait qui est Mickey que grâce au ballon hélium que vous lui avez finalement acheté à la sortie. 5,50 €.

Dans la voiture, en silence, vous repensez au slogan de Disneyland Paris : « Rien que d’y penser, ça fait rêver ».

Pourquoi c’est beaucoup plus marrant de partir en vacances avec plein d’enfants ?

Avant, quand vous étiez « jeune », vos vacances c’était farniente, grasses matinées, apéros qui s’éternisent au coucher du soleil, sorties jusqu’au petit matin à refaire le monde, siestes crapuleuses, séances bronzages et debriefs entre copines, bouquinage de best-sellers jusqu’à plus soif, roucoulades dans les champs de blé déserts ou voyages au bout du monde… Et pourtant, si vous aviez alors connu le bonheur des vacances en familles, vous auriez immédiatement jeté aux orties ces programmes futiles et ennuyeux pour goûter le plus rapidement possible à ces petits bonheurs quotidiens qui sont les vôtres lorsque vous décidez, avec vos amis jeunes parents, de partir en smalas. Et si l’on y réfléchit bien, que d’avantages…

1. Les conversations sont fluides

Eh oui, le top lorsqu’on est en permanence entouré d’une dizaine d’enfants piaillant comme des moineaux affamés, c’est qu’on n’a pas à faire d’efforts de conversation : à peine avez-vous commencé une phrase que l’un ou plusieurs d’entre eux vous coupe alors sans vergogne la parole afin d’exprimer, de manière fort répétitive et sonore, ses desiderata du moment :

–          « Et ça va bien, toi, en ce moment ? »

–          « Bha écoute, le truc c’est que… »

INTERVENTION : « Maman po avoir un gâto… Poavoiirungato… PoavOIRUNGATO PO »

–          « Hein ? Quoi chaton ? Un bateau ? Oui, donc tu disais… ? »

Simultanément : « Ouais, à mon boulot, c’est pas la fête, et puis ma vie tu vois… » / INTERVENTION SONORE : « TATOTATOTATO »…

2. Vous ne boulottez plus de biscuits apéro, ni de biscuits tout court d’ailleurs…

Quand vient l’heure du rosé (y’a une heure pour le rosé ?), vous n’accompagnez plus vos grandes rasades d’olives, cacahuètes, tartines de tapenade, saucissons régionaux ou succulents gressins achetés à prix d’or à la boulangerie du village… Pour la simple et bonne raison que, lorsque vous déboulez avec votre grand plateau de victuailles, la horde de nains affamés ne vous laisse aucune chance. Organisés, rapides car très jeunes, performants, ils piquent en nuées vers les bols en terre cuite avant de s’écarter quelques minutes plus tard vous ayant laissé, magnanimes, les pistaches fermées. L’ivresse vous gagne alors plus vite, vous vous coucherez donc plus tôt. D’un sens, tant mieux… (cf. la suite)

3. Vous faites du sport

-« Elle est à combien la piscine ? », vous enquerrez-vous à votre arrivée dans la belle maison de vacances de votre hôte ?

-« 12 °C »

Sa race. Hors de question que vous trempiez la moindre parcelle de votre peau inutilement épilée pour l’occasion. Ça va pas, non ?

Et pourtant lorsque, quelques heures plus tard, le petit dernier, affublé de ses gros brassards Nemo, vous glissera timidement, tête de labrador abandonné et fesses à l’air à l’appui (plan marketing efficace et étudié) :

« Baban pisciiiiiine moi », vous hésiterez quelques secondes, drapée dans votre épaisse serviette éponge ainsi que dans votre dignité, un Grazia tout frais ouvert sur vos genoux… avant d’avoir de vous l’abominable image d’une vieille pétasse égoïste et flemmarde dédaignant son devoir de mère devant un auditoire scandalisé.

Et là… vous pilonnerez alors consciencieusement la glace formée a la surface de l’eau pour vous y jeter, en sanglots, avec votre progéniture enthousiaste. Raffermissement express des tissus et estime de soi immédiats !

4. Vous avez un wagon de TGV rien que pour vous.

« Regroupons-nous dans la même voiture, ce sera plus sympa ! ». Génial ! Neuf adultes et huit enfants profitant avec enthousiasme des infrastructures mises à leur disposition par la SNCF, ça crée vachement de liens avec les autres occupants ! Et puis, lorsque vous aurez fini de ramper dans toute la voiture pour retrouver la cape Batman de votre fils, soulevant sans vergogne les jambes d’inconnus apràs leur avoir lancé des regads courroucés et injustement accusateurs, puis lorsque, tous ensemble, vous aurez balancé sur l’assemblée ébétée des pluies de chips Lays achetées 1€ au wagon-bar et arrosé consciencieusement le sol de bières tièdes et de pom’potes éventrées, et enfin agrémenté le tout d’une odeur tenace de vomi suite à l’indigestion desdites chips Lays par le petit Samuel, vous vous rendrez compte avec bonheur que ne restent plus présents à votre petite sauterie que des personnes de moins de dix ans accompagnées de morts-vivante excédés. Yeaaaaaaah, envoyez le ziiiiiiik !

5. Vous découvrez des plaisirs inédits

Confortablement installés à table pendant la sieste tant attendue de la smala, vous entendez avec effroi un pleur d’enfant. Un ange passe. Tous, vous tendez l’oreille, vous jetant des regards tour à tour soupçonneux ou angoissés.

–          « C’est le tien ? »

–          « On dirait bien, soufflez-vous alors avec désespoir », repoussant (en tentant de contenir votre exaspération) votre assiette de grillades chaudes à peine entamée. Arrivée devant la porte de votre chambre, vous n’entendez cependant aucun bruit… Et pour cause…

C’est alors avec une joie triomphante maquillée sous un air désolé et compatissant que vous faites rapidement votre grand retour à table : « Amandine, je crois que c’est Charlie ! » Qui c’est qui va manger froid et coagulé ? Pas vous en tous cas !

La vie est faite de petits bonheurs simples…

6. Vous comprenez que vos enfants ne sont pas les pires

Relou de se taper les devoirs de Raphaël, 6 ans, le dimanche soir ? Difficiles, les caprices de votre grand ? Et pourtant, à côté de l’épreuve réveil a 5 heures du mat’, vomi dans la voiture, changeage de couche crottée en plein malaxage de chair a saucisse ou balades sous la pluie pour occuper le sous-groupe « petite enfance » de votre grande smala, vous prenez conscience du caractère enviable de votre sort. Vous ressortez de ce week-end plein d’amour et de reconnaissance pour vos enfants, et d’auto-admiration pour votre teint reposé (vs. les visages en papier crépon / cheveux de paille hirsutes de vos copines mères récentes). Vous comprenez alors  l’expression « chacun voit midi a sa porte »…

7. Vous faites des économies

Au-delà du fait que vous pouvez tout pécho en format familial, le fait de se balader avec une dizaine d’enfants dans un marché ou, pire, un supermarché, vous fait paradoxalement acheter moins. Le temps d’en perdre un ou deux, de faire10 fois, hirsute encore, les allées, slalomant entre tomme de brebis, poules vivantes et olives aillées, de les retrouver agglutinés devant un distributeur de bubble-gums des années 60, attendant patiemment qu’un bonbon tombe par l’opération du Saint-Esprit, attrapé lesdits bambins sous vos bras, retraversé les allées, cherché, avec désespoir, le restant de votre communauté ayant effectué le même parcours que vous, et essuyé les regards menaçants des représentants du sexe mâle, excédés par cette très longue session courses, et bha vous n’avez quasiment rien acheté… Économique. En plus, le stress et vos courses effrénées vous auront fait griller plusieurs centaines de calories. Les enfants, c’est diététique.

8. La voiture, ça passe trop vite !

Voiture de loc = pas de siège-bébé, ou alors pas pré-accroché (c’est vrai qu’à ce prix-la, ce serait trop beau de bénéficier  de ce service grr…), et pas non plus de radio-cd digne de ce nom. Résultat, un chaleureux concert au volume crescendo donné par de jeunes chanteurs surexcités, tentant du même coup d’échapper aux bras de leurs parents au crâne défoncé, ignorant souverainement les regards noirs et menaçants du conducteur au bord du nervous break-down, ainsi que ses grandes tapes dans le vide, coincé qu’il est par la route à regarder. Un concert gratuit, donc, au cours duquel l’ennui ne peut vous gagner à aucun moment. Après, on aime ou on aime pas, question de goût… « abacoooo abacoooo a-BA-COOOOO AaAAaAaAaA BBBbAQAaAaAaA KEUUUuUuquq »

Bref, les vacances en smala, c’est vraiment le top ! Le tout, c’est de ne jamais se laisser dominer par la communauté des moins de dix ans. Leur surnombre, leur organisation, leur énergie et l’accès au pouvoir d’un leader parmi eux peut surprendre et, sans qu’ils s’en rendent compte, déstabiliser la société d’adultes affaiblis par le manque de sommeil ou l’excès de boissons. Heureusement, quelques jours au bureau leur permettront de recharger les batteries pour aborder efficacement les week-ends de mai puis les longues semaines estivales. Comme disait notre ami dominical Jacques Martin, les enfants sont formidables !