
Avant, quand vous étiez « jeune », vos vacances c’était farniente, grasses matinées, apéros qui s’éternisent au coucher du soleil, sorties jusqu’au petit matin à refaire le monde, siestes crapuleuses, séances bronzages et debriefs entre copines, bouquinage de best-sellers jusqu’à plus soif, roucoulades dans les champs de blé déserts ou voyages au bout du monde… Et pourtant, si vous aviez alors connu le bonheur des vacances en familles, vous auriez immédiatement jeté aux orties ces programmes futiles et ennuyeux pour goûter le plus rapidement possible à ces petits bonheurs quotidiens qui sont les vôtres lorsque vous décidez, avec vos amis jeunes parents, de partir en smalas. Et si l’on y réfléchit bien, que d’avantages…
1. Les conversations sont fluides
Eh oui, le top lorsqu’on est en permanence entouré d’une dizaine d’enfants piaillant comme des moineaux affamés, c’est qu’on n’a pas à faire d’efforts de conversation : à peine avez-vous commencé une phrase que l’un ou plusieurs d’entre eux vous coupe alors sans vergogne la parole afin d’exprimer, de manière fort répétitive et sonore, ses desiderata du moment :
– « Et ça va bien, toi, en ce moment ? »
– « Bha écoute, le truc c’est que… »
INTERVENTION : « Maman po avoir un gâto… Poavoiirungato… PoavOIRUNGATO PO »
– « Hein ? Quoi chaton ? Un bateau ? Oui, donc tu disais… ? »
Simultanément : « Ouais, à mon boulot, c’est pas la fête, et puis ma vie tu vois… » / INTERVENTION SONORE : « TATOTATOTATO »…
2. Vous ne boulottez plus de biscuits apéro, ni de biscuits tout court d’ailleurs…
Quand vient l’heure du rosé (y’a une heure pour le rosé ?), vous n’accompagnez plus vos grandes rasades d’olives, cacahuètes, tartines de tapenade, saucissons régionaux ou succulents gressins achetés à prix d’or à la boulangerie du village… Pour la simple et bonne raison que, lorsque vous déboulez avec votre grand plateau de victuailles, la horde de nains affamés ne vous laisse aucune chance. Organisés, rapides car très jeunes, performants, ils piquent en nuées vers les bols en terre cuite avant de s’écarter quelques minutes plus tard vous ayant laissé, magnanimes, les pistaches fermées. L’ivresse vous gagne alors plus vite, vous vous coucherez donc plus tôt. D’un sens, tant mieux… (cf. la suite)
3. Vous faites du sport
-« Elle est à combien la piscine ? », vous enquerrez-vous à votre arrivée dans la belle maison de vacances de votre hôte ?
-« 12 °C »
Sa race. Hors de question que vous trempiez la moindre parcelle de votre peau inutilement épilée pour l’occasion. Ça va pas, non ?
Et pourtant lorsque, quelques heures plus tard, le petit dernier, affublé de ses gros brassards Nemo, vous glissera timidement, tête de labrador abandonné et fesses à l’air à l’appui (plan marketing efficace et étudié) :
« Baban pisciiiiiine moi », vous hésiterez quelques secondes, drapée dans votre épaisse serviette éponge ainsi que dans votre dignité, un Grazia tout frais ouvert sur vos genoux… avant d’avoir de vous l’abominable image d’une vieille pétasse égoïste et flemmarde dédaignant son devoir de mère devant un auditoire scandalisé.
Et là… vous pilonnerez alors consciencieusement la glace formée a la surface de l’eau pour vous y jeter, en sanglots, avec votre progéniture enthousiaste. Raffermissement express des tissus et estime de soi immédiats !
4. Vous avez un wagon de TGV rien que pour vous.
« Regroupons-nous dans la même voiture, ce sera plus sympa ! ». Génial ! Neuf adultes et huit enfants profitant avec enthousiasme des infrastructures mises à leur disposition par la SNCF, ça crée vachement de liens avec les autres occupants ! Et puis, lorsque vous aurez fini de ramper dans toute la voiture pour retrouver la cape Batman de votre fils, soulevant sans vergogne les jambes d’inconnus apràs leur avoir lancé des regads courroucés et injustement accusateurs, puis lorsque, tous ensemble, vous aurez balancé sur l’assemblée ébétée des pluies de chips Lays achetées 1€ au wagon-bar et arrosé consciencieusement le sol de bières tièdes et de pom’potes éventrées, et enfin agrémenté le tout d’une odeur tenace de vomi suite à l’indigestion desdites chips Lays par le petit Samuel, vous vous rendrez compte avec bonheur que ne restent plus présents à votre petite sauterie que des personnes de moins de dix ans accompagnées de morts-vivante excédés. Yeaaaaaaah, envoyez le ziiiiiiik !
5. Vous découvrez des plaisirs inédits
Confortablement installés à table pendant la sieste tant attendue de la smala, vous entendez avec effroi un pleur d’enfant. Un ange passe. Tous, vous tendez l’oreille, vous jetant des regards tour à tour soupçonneux ou angoissés.
– « C’est le tien ? »
– « On dirait bien, soufflez-vous alors avec désespoir », repoussant (en tentant de contenir votre exaspération) votre assiette de grillades chaudes à peine entamée. Arrivée devant la porte de votre chambre, vous n’entendez cependant aucun bruit… Et pour cause…
C’est alors avec une joie triomphante maquillée sous un air désolé et compatissant que vous faites rapidement votre grand retour à table : « Amandine, je crois que c’est Charlie ! » Qui c’est qui va manger froid et coagulé ? Pas vous en tous cas !
La vie est faite de petits bonheurs simples…
6. Vous comprenez que vos enfants ne sont pas les pires
Relou de se taper les devoirs de Raphaël, 6 ans, le dimanche soir ? Difficiles, les caprices de votre grand ? Et pourtant, à côté de l’épreuve réveil a 5 heures du mat’, vomi dans la voiture, changeage de couche crottée en plein malaxage de chair a saucisse ou balades sous la pluie pour occuper le sous-groupe « petite enfance » de votre grande smala, vous prenez conscience du caractère enviable de votre sort. Vous ressortez de ce week-end plein d’amour et de reconnaissance pour vos enfants, et d’auto-admiration pour votre teint reposé (vs. les visages en papier crépon / cheveux de paille hirsutes de vos copines mères récentes). Vous comprenez alors l’expression « chacun voit midi a sa porte »…
7. Vous faites des économies
Au-delà du fait que vous pouvez tout pécho en format familial, le fait de se balader avec une dizaine d’enfants dans un marché ou, pire, un supermarché, vous fait paradoxalement acheter moins. Le temps d’en perdre un ou deux, de faire10 fois, hirsute encore, les allées, slalomant entre tomme de brebis, poules vivantes et olives aillées, de les retrouver agglutinés devant un distributeur de bubble-gums des années 60, attendant patiemment qu’un bonbon tombe par l’opération du Saint-Esprit, attrapé lesdits bambins sous vos bras, retraversé les allées, cherché, avec désespoir, le restant de votre communauté ayant effectué le même parcours que vous, et essuyé les regards menaçants des représentants du sexe mâle, excédés par cette très longue session courses, et bha vous n’avez quasiment rien acheté… Économique. En plus, le stress et vos courses effrénées vous auront fait griller plusieurs centaines de calories. Les enfants, c’est diététique.
8. La voiture, ça passe trop vite !
Voiture de loc = pas de siège-bébé, ou alors pas pré-accroché (c’est vrai qu’à ce prix-la, ce serait trop beau de bénéficier de ce service grr…), et pas non plus de radio-cd digne de ce nom. Résultat, un chaleureux concert au volume crescendo donné par de jeunes chanteurs surexcités, tentant du même coup d’échapper aux bras de leurs parents au crâne défoncé, ignorant souverainement les regards noirs et menaçants du conducteur au bord du nervous break-down, ainsi que ses grandes tapes dans le vide, coincé qu’il est par la route à regarder. Un concert gratuit, donc, au cours duquel l’ennui ne peut vous gagner à aucun moment. Après, on aime ou on aime pas, question de goût… « abacoooo abacoooo a-BA-COOOOO AaAAaAaAaA BBBbAQAaAaAaA KEUUUuUuquq »
Bref, les vacances en smala, c’est vraiment le top ! Le tout, c’est de ne jamais se laisser dominer par la communauté des moins de dix ans. Leur surnombre, leur organisation, leur énergie et l’accès au pouvoir d’un leader parmi eux peut surprendre et, sans qu’ils s’en rendent compte, déstabiliser la société d’adultes affaiblis par le manque de sommeil ou l’excès de boissons. Heureusement, quelques jours au bureau leur permettront de recharger les batteries pour aborder efficacement les week-ends de mai puis les longues semaines estivales. Comme disait notre ami dominical Jacques Martin, les enfants sont formidables !
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