Mais t’as pas froid ?

– T’as pris ton manteau 

– …

– Houhou t’as pris ton manteau, il fait 8°C

– Ah…

– « Ah », quoi ? Tu comptais sortir en sweat à capuche ?

– Bha… ouais. Chepa, j’ai pas froid.

Tous les matins c’est la même chose. Le jeune part à poil dans les frimas de l’automne, le cou au vent, les chevilles à l’air (avec ses mini-chaussettes), faisant s’emblant d’avoir complètement mais complètement oublié sa parka (et le concept même d’enfiler quelque chose au-dessus d’un pull) quand il ne rentre pas avec ledit objet roulé en boule sous son bras comme si on l’avait forcé à porter une armure médiévale pour aller au collège. Après une large enquête d’investigation, il semblerait que mon jeune ne soit pas seul. Que tous les Français de moins de trente ans rechignent à enfiler le moindre effet à fonction réchauffante. « Encombrant », « trop relou » (« bha ouais, c’est trop relou, un manteau »… à mon tour de dire « ah »), moche… J’en parle à ma mère qui ricane. « Tu te souviens que tu attendais d’être au coin de la rue pour faire la même chose ? Tu crois que je ne te voyais pas ?! ». Merde mais c’est vrai… Soudain, je me souviens du duffle-coat balancé l’air de rien sur la anse du sac en paille, des pulls Benetton superposés les uns sur les autres sous une mini-veste en jean à se les peler sévère (sans plus pouvoir bouger les bras) pour le simple bénéfice du staïle. Je me souviens de ma grand-mère qui s’exclamait toujours « ah mais tu es réchauffée, toi ! Tu me fais froid » Et moi qui me demandais comment on pouvait tolérer de porter trois Damart, un cachemire et un foulard en intérieur. Je me souviens aussi des filles de Sex and the city quand elles sont apparues dans nos vies, et de ma soudaine envie de me balader sans collants, en sandalettes à paillettes en plein mois de décembre pour aller au Lady’s night du bus.  De tous ces « mais t’as pas froiiiiid ? » qu’on me balançait, et moi qui me disais « mais quand bien même les gars, qu’est-ce qu’on s’en fout ? » J’observe ma dégaine du jour. Manches longues, chaussettes épaisses, et la fameuse micro-doudoune doudoune Uniqlo (des vieux) glissée discrétos sous mon trench. Damned, je me dis que ayé, j’ai franchi la barrière. La barrière du froid. Et que vieillir, c’est dire des phrases trop relou du style « je te l’avais bien dit » ou « arrête de lire, tu vas être crevé demain ». Mais c’est aussi vouloir que tout le monde ait froid comme soi. Merde alors. Bon allez, demain, je sors sans manteau. #foreveryoung.

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